Station : Vavilov ! Enjeux et méthode

Une version adaptée en distanciel, pour cause de Covid-19, de la performance Station : Vavilov !, a été diffusée pour la première fois, en direct, le 30 janvier 2021, lors du festival À l’École de l’Anthropocène, organisé par l’EUL, École Urbaine de Lyon.

Enjeux et méthode

Depuis 2014, le CRBA, Centre de Ressources de Botanique Appliquée, installé dans la Métropole lyonnaise, travaille avec l’Institut de ressources génétiques végétales Vavilov de Saint Pétersbourg, la 4ème banque de semences végétales au monde par sa taille, et la plus ancienne en terme d’âge, sur la création d’une station d’expérimentation botanique. Objectif : face aux modifications provoquées par le bouleversement climatique, retrouver, réintroduire et réacclimater des variétés végétales anciennes,  récoltées au début du XXe siècle, entre autre dans la région lyonnaise, pour qu’elles puissent être la base de notre agriculture locale de demain. Régulièrement, des botanistes, généticiens, agronomes, mais aussi des jardiniers, des maraichers ou des cuisiniers français et russes se rencontrent, avec pour objectif de revitaliser, expérimenter et remettre en activité une mémoire végétale constituée depuis un siècle. Notre sécurité alimentaire et agricole est sérieusement bousculée par le bouleversement climatique en cours et ces espèces végétales oubliées d’hier sont une des solutions pour pouvoir y remédier.

J’ai été invité à suivre ce projet en tant que poète, au sein d’une équipe de création éthno-artistique comprenant également un anthropologue, un plasticien-vidéaste et un musicien. Ensemble, il s’est agi pour nous de croiser les disciplines, de réfléchir au contact des scientifiques, de créer, et si possible de créer autrement, en nous laissant imprégner des méthodes artistiques et scientifiques que nous côtoyions. Car l’enjeu n’était pas ici d’effectuer un simple travail d’observateur et de témoignage du travail scientifique en cours, un peu documentaire, un peu teinté de poésie… Mais bien, face à des enjeux gigantesques que ne saura résoudre à elle seule aucune discipline, aussi puissante et maîtrisée soit-elle, de se regarder travailler l’un l’autre, de comprendre des systèmes de pensées et des méthodes qui nous sont inconnues, de les comparer, de les tester chacun sur notre propre domaine d’action ou de création, et véritablement d’ouvrir les champs de réflexions les plus larges possibles.

Le travail d’hybridation des phytogénéticiens de l’Institut Vavilov consiste à croiser, manuellement et naturellement, différentes variétés de plantes anciennes pour en obtenir une troisième, stable et moderne, incluant des caractéristiques des deux premières. Cette nouvelle variété sera mise en circulation comme le seront à nouveau les variétés anciennes dont elle est issue.

Adoptant cette méthode, je me suis appliqué à hybrider des textes d’ethno-botanique du XXe et XXIe siècle avec des formes anciennes, oubliées ou peu connues de poésie à forme fixe, le monostiche, le sonnet, la ballade, le pantoun, pour “remettre en circulation” des formes modernisées de ces “anciennes variétés” poétiques.

C’est ainsi que j’ai appliqué de manière systématique la règle du monostiche classique, telle que définie par le poète Emmanuel Lochac, à la lecture/réécriture de l’ouvrage fondateur de l’ethnobotanique, L’Homme et les plantes cultivées, d’André G. Haudricourt et Louis Hédin (Gallimard 1943). Un pantoun a été construit sur la base du carnet de recherche Herbier de terrain, de l’anthropologue Olivier Givre. Une série de cinq sonnets est tiré des cinq premiers chapitres du livre Aux sources de notre nourriture, de Gary Paul Nabhan (Nevicata 2010), qui a voyagé sur les pas de Nikolaï Vavilov presque un siècle après celui-ci. Et une ballade, en vers de douze pieds, a été construite à partir du livre Fleurs, fruits, légumes. L’épopée lyonnaise, de Stéphane Crozat, directeur du CRBA (Éditions Lyonnaises d’Art et d’Histoire 2010).

L’hybridation étant naturelle, aucun intrant chimique ni personnel n’a été toléré et chaque texte a été uniquement construit à partir de mots prélevés inchangés dans les pages des éditions d’origine.

STATION : VAVILOV ! – Performance

Écrivain et poète : Jean-Baptiste CABAUD
Compositeur, musicien : David CHAMPEY
Plasticien : Vincent DELPEUX
Anthropologue : Olivier GIVRE
Régisseur : Loïc CORLIER
Responsable de production : Sabrina NOVAK

UN MERCI PARTICULIER pour leur participation généreuse et enregistrée à Voix russe : Bénédicte BRACONNAY / Voix hébraïque : Marie-Pierre GIBERT / Voix rwandaise : Domitille MUKANKUBANA / Voix bulgare : Meglena ZLATKOVA

Projet soutenu par L’École Urbaine de Lyon, Universités de Lyon, la DRAC et la Région AURA, dans le cadre de l’appel à projets “Mémoires des XXe et XXIe siècles État/Région”, et la Villa Gillet, dans le cadre de la résidence de création.

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